Un homme d’une trentaine d’années se trouve désespéré après une rupture amoureuse violente. Un énième soir de peine, alors qu’il se demande s’il ne vaudrait pas mieux carrément en finir, il décide de faire tourner la lampe de chevet-mappemonde qu’il garde près de son lit, et prononce ces mots: « où mon doigt s’arrêtera, j’irai ».
Son index atterrit à l’autre bout de la terre, précisément sur l’île Bikini, au milieu de l’Océan Pacifique. Après quelques recherches sur cet endroit qui ne lui évoquait jusqu’à lors que deux petits morceaux de tissus, il apprend que l’île fut après-guerre le théâtre d’essais nucléaires, et qu’elle est aujourd’hui inhabitée pour cause de radioactivité extrême. « Il est tout de même possible de s’y rendre, en signant une décharge indiquant qu’on renonce à toute poursuite en cas de cancer. » Au point où il en est, ça ne lui fait pas plus peur que ça. Un cancer ou la mort lente de son âme… Bikini c’était et Bikini ce serait.
Pourtant, quand il arrive enfin sur ladite île après un long périple, le paysage ne ressemble pas du tout à l’endroit désolé et militarisé qu’il avait imaginé. C’est beau c’est… une île, aussi jaune qu’il l’aurait dessiné avec ses crayolas quand il était petit, avec une mer aussi bleue que la peinture quand elle sort du tube, des palmiers d’un vert terrain de golf et puis… rien. Des kilomètres de sable et de dunes intactes. Pas un chat. Au bout d’un moment, il finit par apercevoir un genre de cabanon, qui ressemble d’ailleurs exactement au cabanon parfait dans lequel il imaginait un jour se retirer dans sa vie rêvée d’écrivain maudit. Il voit de la lumière qui vient de l’intérieur. Alors il décide de s’approcher.
« Bonjour… »
Une femme d’un certain âge et en même temps sans âge lui répond. Elle n’a pas l’air plus étonnée que ça. Elle lui propose du thé.
« Je m’appelle Marthe. »
Anne Bouguereau