Le piano est doux, agréable, presque lascif ; une bossa d’ascenseur? Une femme fort apprêtée, élégante, chignon haut, robe crayon, stilettos vernis aux pieds, yeux charbonneux, accueille le public. Elle ne parle pas si fort, elle est plutôt douce, gracieuse, intercédant aux demandes des convives, s’assurant que chacun, chacune, a trouvé place agréable, est servi.e en vins, en fromages… La dégustation débute ainsi, on suit le phrasé ampoulé, presque retenue de cette femme qui initie l’assemblée à l’accord entre trois vins et trois fromages. Il semble pourtant que la voix est un peu tremblante ou haletante, que les yeux pleurent un peu, peut-être même que les yeux de cette femme larmoient. Son chignon dégringole peu à peu. Sa robe se déchire au moment même où l’un de ses talons se casse et laisse apparaitre un de ses seins. C’est alors que tout valse: le piano se cabre, les mots dociles volent, les phrases soumises s’écrasent au sol, les habits tombent, la bienséance et la courtoisie se brisent en mille éclats. Jaillit alors une femme œnologue de terrain, métamorphosée, sans artifice et sans fard, ouvrant son monde inclusif, au franc-parler, au travail acharné, aux grandes aubes, aux petits matins, et aux délices viticoles simples, accessibles à toutes et tous.